Focus sur la filière légumes de plein champs bio en Normandie : freins et opportunités

[Structuration de la filière légumière bio normande]

La Normandie compte une trentaine de producteurs en légumes de plein champ (LPC). Une dizaine d’opérateurs, qu’ils soient collecteurs, transformateurs, distributeurs, structurent la filière. Plusieurs producteurs de LPC bio ont sollicité Bio en Normandie pour réaliser une étude sur la filière régionale afin d’en identifier le fonctionnement et comprendre les besoins, leviers et opportunités qu’elle présente. Ainsi, 20 producteurs et 10 opérateurs ont participé à l’enquête de Bio en Normandie en 2022. Parallèlement, un travail a également été mené au niveau national sous l’impulsion de la FNAB (Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique) et des autres GRAB (Groupements Régionaux de l’Agriculture Biologique). 

La filière LPC bio, à l’image de la filière bio globale, a connu entre 2015 et 2017 une forte période de conversion des producteurs et des opérateurs. Ces derniers, devant l’opportunité du marché bio et la nécessité d’approvisionner des usines taillées pour accueillir du volume, ont encouragé les producteurs à se convertir. Les surfaces et les volumes ont alors fortement augmenté pour répondre à une croissance à deux chiffres du Bio. Aujourd’hui, la filière légumes connaît un réel ralentissement de la progression de la consommation. Fortement impactée par l’après période COVID, la consommation des légumes bio ne cesse de diminuer, notamment au sein des principaux canaux de distribution que sont les grandes et moyennes surfaces (GMS) et les magasins spécialisés, ayant pour conséquence de déstabiliser la filière. En effet, la demande est inférieure à l’offre, impactant les pratiques de producteurs (emblavements, prix, déclassements, etc). 

Une dynamique de consommation qui ralentit sur les légumes, impactant la stratégie des producteurs entre 2021 et 2022

La dynamique de consommation que connaît actuellement la filière légumes de plein champ conduit les producteurs à s’adapter au contexte socio-économique.

D’après les producteurs enquêtés, nous observons une baisse des emblavements entre 2021 et 2022 sur la majorité des légumes cultivés en LPC bio : Betteraves (-25%), pommes de terre (-14%), carotte (-7%). 

Ces baisses de surface entraînent une diminution des volumes produits, ayant pour objectifs de : 

  • Sécuriser le marché, les débouchés et les prix payés 
  • Maintenir une valorisation des légumes en Bio 
  • Limiter les coûts de productions
  • Maintenir une stratégie économique viable pour les fermes de légumes bio

Des producteurs favorables à valoriser leur production localement

Les LPC bio produits en Normandie sont majoritairement transformés sur le territoire. La distribution s’effectue en Normandie mais également dans les régions limitrophes en GMS et/ou magasins spécialisés.

D’après les retours d’enquêtes “producteurs” et “opérateurs”, près de 2 800 tonnes de LPC bio sont valorisés directement sur le territoire Normand par les opérateurs. 

À noter que la majorité des producteurs interrogés sont prêts à s’investir pour valoriser leur production localement. Pour cela, ils soulignent la nécessité d’une implication politique, financière et humaine des collectivités dans cette démarche, par l’accompagnement et la structuration de projet sur leur territoire. 

Prendre davantage en compte la loi EGALIM et l’obligation des 20% de produits bio en restauration collective, pour des légumes bio et locaux dans les assiettes.

Les établissements de restauration collective ont également été interrogés dans le cadre de cette étude. Ils identifient plusieurs atouts et faiblesses au développement de l’approvisionnement en légumes bio : 

AtoutsFaiblesses
– Un contexte légal qui oblige à acheter 20 % de produits bio- Un contexte légal qui favorise la diversification des sources de protéines- Une demande des élus d’avoir plus de produits bio et locaux- La disponibilité des volumes en légumes. – Des producteurs prêts à s’engager localement dans des projets de valorisation de leur production. – Des besoins en volumes très différents (de nombreux petits sites)- Un manque d’organisation logistique des producteurs pour livrer des petits volumes- Au delà d’un certain volume -> référencement obligatoire- Aucun engagement vu le contexte actuel (inflation)- Des tarifs en conventionnels moins chers mais la différence se comble avec l’inflation

Quelles pistes pour les collectivités pour développer la filière LPC Bio ? 

Alors qu’il émane régulièrement des diagnostics de PAT (Projets Alimentaires Territoriaux) un déficit d’offre de légumes (bio) sur les territoires, la filière légumes bio représente une réelle opportunité pour les collectivités de répondre à leurs objectifs de relocalisation alimentaire durable et de qualité pour tou.te.s (notamment la loi Egalim). Les volumes importants, notamment en LPC, peuvent permettre d’assurer une sécurisation des approvisionnements. Plusieurs leviers ou pistes d’actions des collectivités peuvent être cités : 

  • Apporter une communication et un appui politique fort à la filière LPC bio (pour exemples : le travail de structuration de filières LPC bio mené par le pôle métropolitain Rouen Seine Eure ou encore le projet Qu’est-ce Qu’on Mange Demain dans le Bocage dans l’Orne).
  • Accentuer la mise en œuvre de la loi Egalim et l’obligation de mettre en place 20% de produits issus de l’agriculture biologique dans la restauration collective (aujourd’hui, le bio représente entre 6 à 10% des approvisionnements), et notamment l’approvisionnement en légumes bio locaux. 
  • Communiquer auprès du grand public sur les bénéfices multiples de l’agriculture biologique (réponse aux besoins et attentes de la société en matière d’alimentation de qualité et de proximité, environnementaux, sociaux, économiques…). 
  • Développer des outils de transformation et de distribution locaux tels que des légumeries-conserveries (en veillant à une échelle pertinente – rationalisée par rapport à l’offre et besoins). 

Gaëtan LESAGE, Chargé de mission filières & dynamique territoriale


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