Une étude de France Stratégie souligne les résultats économiques des exploitations engagées dans des systèmes agroécologiques

Après avoir analysé une vingtaine de référentiels et cahier des charges publics et privés, les auteurs de l’étude affirment que « Si la rentabilité économique des référentiels n’est pas toujours corrélée aux exigences environnementales, l’Agriculture Biologique est néanmoins la plus performante d’un point de vue économique et en terme d’exigences environnementales ».

France Stratégie, institution autonome placée auprès du Premier Ministre, produit des analyses et des évaluations des politiques publiques à la demande du gouvernement dont les résultats s’adressent aux pouvoirs publics, à la société civile et aux citoyens. Dans cette étude publiée en août 2020 et intitulée « Améliorer les performances économiques et environnementales de l’agriculture : les coûts et bénéfices de l’agroécologie », les auteurs ont cherché à répondre à la question suivante : l’agroécologie est-elle rentable pour les agriculteurs ?

Au préalable, les auteurs définissent l’agroécologie comme une notion regroupant « toutes les pratiques agricoles fondées sur une utilisation optimale des ressources naturelles pour réduire au minimum le recours aux intrants de synthèse et accroître la résilience et l’autonomie des exploitations agricoles ».

Les auteurs ont analysé 23 cahiers des charges ou référentiels français, publics et privés, qui relèvent des principes de l’agroécologie, selon la définition retenue par les auteurs. L’analyse s’est effectuée en deux temps : d’abord sur le volet environnemental puis sur le volet économique.

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L’évaluation du volet environnemental s’est faite à travers plusieurs critères regroupés en quatre rubriques :

  • Biodiversité de l’agroécosystème
  • Préservation des ressources
  • Intrants utilisés en production végétale
  • Intrants utilisés en production animale

Les résultats démontrent que six cahiers des charges se distinguent par un niveau d’exigences environnementales élevé : AB, HVE option A, Nature et Progrès, Demeter, Permaculture et Bio Cohérence. A noter que les trois cahiers des charges les plus élevés ne labellisent que des productions qui sont déjà certifiés AB. Ils sont couramment désignés comme des cahiers de charge promouvant une « Bio + » c’est-à-dire une Agriculture Biologique plus exigeante que celle définie par l’Union Européenne.

Au-delà, le classement révèle une grande hétérogénéité entre les différents référentiels et cahier des charges analysés. En effet, plus de la moitié des référentiels n’atteignent pas les 50 points, et six se situent en-dessous des 30 points, reflet des différents niveaux d’ambitions environnementales des cahiers des charges et référentiels analysés.

En conclusion de l’analyse du volet environnemental, les auteurs de l’étude proposent une distinction entre deux types d’exploitations agroécologiques :

  • Les exploitations agricoles qui reposent sur des systèmes de production basés sur les principes de l’Agriculture Biologique bénéficiant d’une reconnaissance du consommateur et de prix plus élevés qu’en agriculture conventionnelle. Elles sont reconnues et certifiées par les six premiers référentiels/cahier des charges du classement.
  • Les exploitations agricoles qui reposent sur des systèmes de production fondés sur les pratiques de l’agriculture conventionnelle, et qui, en dépit de contraintes supplémentaires, ne bénéficient pas de prix plus élevés.

Après l’analyse des performances environnementales, les auteurs proposent une évaluation des performances économiques. Pour ne pas biaiser les résultats, les auteurs précisent d’emblée que les aides provenant de la PAC ne sont pas intégrées puisqu’elles visent à compenser des manques à gagner et/ou rémunérer les services environnementaux rendus.

Concernant l’Agriculture Biologique, les résultats économiques observés affichent un bénéfice global. En matière de coûts, les deux postes les plus importants par rapport au conventionnel sont la réduction de la production et l’augmentation des charges de main-d’œuvre et de mécanisation. Côté bénéfices, les deux postes déterminants sont l’augmentation des prix et la réduction des charges (engrais et produits phytosanitaires). Certaines études économiques réalisées sur plusieurs années démontrent également une meilleure stabilité économique et une plus grande résilience des exploitations biologiques.

Concernant les MAEC, la difficulté pour l’exploitant agricole résulte de la non-valorisation de sa production. En effet, la mise en place de MAEC ne permet pas une augmentation des prix. D’après les études, à moyen terme, les pratiques en MAEC « Grandes Cultures » sont rentables grâce à de faibles charges liées à la moindre utilisation de produits phytosanitaires et par un gain en valeur du produit brut.

Concernant les fermes Dephy, elles ne sont pas toutes impactées de la même manière lorsqu’elles réduisent leurs intrants, notamment les produits phytosanitaires. La thèse de Martin Lechenet, publiée en 2017, souligne que la rentabilité des deux tiers des exploitations agricoles d’un échantillon de 946 fermes du réseau n’est pas impactée significativement par la réduction de produits phytosanitaires.

L’analyse de ces trois référentiels/cahier des charges (AB, MAEC et Dephy) indiquent que les systèmes agroécologiques sont, dans la plupart des cas, plus rentables à moyen terme, que les systèmes conventionnels.

Pour identifier quels référentiels/cahier des charges sont les plus rentables, les auteurs de l’étude ont modélisé une transition agroécologique d’une exploitation conventionnelle en grandes cultures. L’objectif était de répondre à la question suivante : si je suis un agriculteur qui pratique une agriculture conventionnelle et que je souhaite orienter l’exploitation vers l’agroécologie, quel est le référentiel/cahier des charges le plus rentable ? Après comparaison, les coûts liés à la réduction de la marge directe sont très faibles pour les référentiels Dephy et LU Harmony (0 % à 3 %). A l’inverse, ils augmentent considérablement pour le référentiel HVE option B. Le référentiel AB est le seul à présenter des bénéfices. Ainsi, cette modélisation démontre que les systèmes les plus exigeants d’un point de vue environnemental ne sont pas nécessairement les plus coûteux.


 

Source : France Stratégie, « Améliorer les performances économiques et environnementales de l’agriculture : les coûts et bénéfice de l’agroécologie », Août 2020
Lien : https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs-2020-dt-agroecologie-aout.pdf

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